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Avicii, un génie en difficulté

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Plusieurs années après son tragique décès, Avicii est toujours dans les mémoires. Il fait partie des artistes décédés les plus écoutés au monde (il occupe la 3e place du classement). De multiples hommages lui ont été rendus, l’un des derniers en date étant dans son pays d’origine, où le plus grand bâtiment sphérique du monde (que les Suédois surnomment « Globen » -le Globe) a été rebaptisé l’Avicii Arena. Cette salle omnisport et de spectacle sera de ce fait également utilisée pour promouvoir la lutte contre les maladies mentales, cause de la tragique fin de vie de cet artiste partie trop tôt…

Avicii, Tim Bergling de son vrai nom, est né le 8 septembre 1989 à Stockholm en Suède. Il est le fils de Klas Otto Bergling, un chef d’entreprise, et d’Anna Catarina Lidén, une actrice connue sous le nom d’Anki Lidén. Ses parents ont tous deux des enfants nées d’une précédente union. Tim a ainsi donc un demi-frère (David) et une demi-sœur (Linda) du côté de son père, et un demi-frère (Anton Körberg, présentateur télé, musicien et acteur né en 1977) du côté de sa mère. Il est le seul enfant né de l’union de ses parents, un an plus tôt. Klas, dont le père est Carl Birger Bergling, scénographe et costumier au Royal Swedish Opera, est le directeur général de l’entreprise de meubles Egyptiska Magasinet AB, qu’il a fondée dans les années 1970. La petite famille vit dans le quartier chic Östermalm à Stockholm. Le petit garçon à la bouille d’ange est un enfant spécial, doué pour le dessin et l’écriture d’histoires. Il est également très sensible. Dès le plus jeune âge, Tim se passionne pour la musique. Il grandit en écoutant Ray Charles et les tubes de Rock des années 60 grâce à son père, tandis que ses frères lui font découvrir le groupe Kiss. Il est très influencé par ses grands frères, particulièrement Anton (dont le père est le chanteur Tommy Körberg). On dit de lui qu’il n’a que huit ans quand il commence à s’amuser en faisant de la musique dans sa chambre.

C’est à l’adolescence, durant ses années lycée, qu’il commence à faire de la musique un choix de carrière. Tim est alors un jeune homme introverti, qui n’aime pas attirer l’attention. Ses problèmes d’acné le rendent encore plus timide. Il est inscrit à l’école huppée Östra Reals gymnasium(également fréquentée par Otto Knows et Alesso) située dans son quartier. Lorsqu’il n’est pas en cours, il se réfugie chez lui pour s’adonner à sa passion. Sa vie change lorsqu’un de ses amis lui fait découvrir le logiciel FL Studio qui permet de créer sa propre musique. Ne sachant pas jouer d’un instrument, il y voit là une aubaine, et s’amuse en explorant différents genres pendant des heures. Il devient très vite accro. Déjà fan de Daft Punk, il découvre la musique électronique et ce qu’est la House, et se met à écouter des artistes tels que Steve Angello, Eric Prydz, Axwell, Sebastian Ingrosso et Laidback Luke : ils ont tous une grande influence sur lui. Il s’amuse à faire des remix dans sa chambre. Le premier à être remarqué est celui de la bande-son de Lazy Jones, jeu vidéo des années 80 qui se jouait sur le Commodore 64. Déjà remixé en 1999 par Zombie Nation, Tim en fait une version House baptisée Lazy Lace. Poussé par ses amis, il décide d’inonder le web de sa musique sous différents pseudonymes et poste ses morceaux sur des blogs, n’hésitant pas à contacter les propriétaires afin de demander l’autorisation d’en faire la promotion. Il en fait de même sur le forum de Laidback Luke. Bien décidé à mettre en avant ses productions, Tim se crée une page MySpace, mais tous les pseudos qu’il souhaite utiliser son déjà pris, y compris son propre nom. Un ami lui propose alors le mot « Avīci » qui désigne le niveau le plus bas du royaume des enfers dans le bouddhisme. Ce terme étant également déjà utilisé, il décide d’y ajouter un « i » à la fin : c’est la naissance d’Avicii.

Tout ce travail n’est pas en vain, puisqu’Avicii se fait remarquer par un manager qui le contacte via Facebook : après s’être rencontré, il signe avec Arash Pournouri. C’est lui qui l’introduit très vite au Djing. Il mixe pour la première fois à un bal de promo devant 40 autres adolescents. Il décide de participer au « Pete Tong Fast Trax », compétition organisée par Pete Tong où il remporte 70% des voix. Cela lui permet de sortir son premier titre intitulé Manman sous le label de Tong, Bedroom Bedlam. À 19 ans, il se fait remarquer par différents labels et commence à signer des contrats. Il publie le titre Sound Of Now en 2008, puis Ryu l’année suivante. C’est à cette époque qu’il commence à combiner des voix à ses productions. Ce n’est qu’en 2010-2011 qu’il se fait remarquer par le grand public, avec le titre Bromance, puis surtout le single Levels. Son premier album baptisé True arrive deux ans plus tard.

Avicii impressionne ses pairs. Son style, qui combine l’électro avec différents genres de musiques populaires, lui amène le succès, aussi bien au niveau commercial que du côté des critiques. Tout s’enchaine très vite. Il est sollicité par des grands noms de la musique, aussi bien pour des remix que des collaborations. Il ne cesse de créer : un album de remix (True Avicii by Avicci), un EP (The Days / Nights EP) puis un second album studio (Stories). Il se produit également sur scène à travers le monde. L’adolescent extrêmement introverti à ses débuts est devenu un jeune homme couronné de succès. Mais il n’en reste pas moins timide et complètement nerveux, et doit se présenter devant des foules de plusieurs milliers de personnes.

Le rêve des premières années devient alors un cauchemar… Les dates s’accumulent et avec elle l’inquiétude, ainsi que les phases dépressives. Pour gérer le stress et les crises d’angoisse avant de monter sur scène, Avicii consomme beaucoup d’alcool fort et de boissons énergisantes. Il cherche de la confiance au fond des bouteilles. Il développe des comportements addictifs qui ont des conséquences sur sa santé : on lui diagnostique une pancréatite aiguë. En 2014, il est forcé d’annuler des concerts pour se faire retirer la vésicule biliaire et l’appendice. Il est en grande souffrance, mais souhaite tout de même honorer ses shows. Voyages, fatigue, pression, nuits blanches… Il tient à coup de médicaments. Malade, stressé, au bord du burn-out, il décide d’arrêter de se produire sur scène en 2016, après plus de 800 concerts en 8 ans (soit un tous les 3 jours). Son manager, tente de l’en dissuader, objectant que cela engendrerait des conséquences financières, mais Avicii n’en démord pas : il arrête, « Il est difficile de dire non dans cette industrie. Vous voulez jouer tout et partout. Là, c’est mon corps qui a dit stop » dit-il. Cette décision arrive malheureusement peut-être trop tard, puisqu’il décède à peine deux ans après, à l’âge de 28 ans. Il est en vacances avec des amis à Mascate, capitale d’Oman, quand il est retrouvé dans sa chambre d’hôtel le 20 avril 2018 : il se serait automutilé avec un tesson de bouteille de vin, et serait décédé suite à l’hémorragie provoquée par les coupures. Il est inhumé le 8 juin au cimetière Skogskyrkogården à Stockholm, durant une cérémonie intimiste.

La mort d’Avicii a provoqué un véritable choc, et a mis en lumière le mal-être dans lequel était l’artiste depuis plusieurs années. Cet être si sensible et timide n’a pas pu gérer toute la pression non-stop liée au star-système et le style de vie éreintant dans lequel il a été plongé à un jeune âge. « La scène n’était pas pour moi. Ce n’était pas les shows ni même la musique… Mais tout ce qu’il y a autour, qui ne m’a jamais paru naturel. Je suis quelqu’un de beaucoup plus introverti dans la vie. Ça a toujours été très dur pour moi. J’ai emporté avec moi trop d’énergie négative », expliquait-il au magazine Billboard. Pour honorer celui qui avait cofondé la tournée House for Hunger, et qui s’était engagé pour attirer l’attention sur la lutte contre la traite des enfants, les parents d’Avicii ont fondé la Tim Berglin Foundation, dont le but premier est la sensibilisation à la santé mentale et la prévention du suicide. Une initiative plus que louable tant il est nécessaire à notre époque de mettre fin à l’espèce de tabou entourant tout ce qui est d’ordre mental et psychologique. Le fait que les maladies telles que la dépression, les troubles anxieux et autres stress post-traumatiques se logent dans l’esprit n’en font pas moins des choses bien réelles, qui nécessitent une prise en charge. Avicii nous aura laissé un catalogue impressionnant qui rythmera encore les vies de ses nombreux fans durant des années, Tim Berglin nous aura appris à quel point il est important de prendre soin de son corps et son esprit.  Comme le disait l’écrivain québécois Yves Thériault : « Un cerveau tranquille, c’est l’essentiel d’une bonne vie. On le dit. Avoir la paix de l’esprit, c’est le plus grand des biens… ».

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1 commentaire

Scarlet 8 juillet 2022 - 14h49

Triste destin. Merci pour ce portrait qui met l’accent sur certaines choses tues dans ce milieu souvent trop glorifié.

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